La CAULERPA TAXIFOLIA:
Comment en tirer parti ?

Présentation d’une algue : la Caulerpa taxifolia

Origine

       En 1984, la Caulerpa taxifolia est signalée pour la première fois en Méditerranée. Cette parcelle d’une surface d’environ 1 m² était située aux pieds du rocher de Monaco que surplombe le Musée Océanographique de Monaco. N’ayant rencontré aucun obstacle dans sa progression, cette algue a montré une incroyable capacité à se propager et à coloniser les fonds marins.

Arrivée de la Caulerpa taxifolia en mer méditerranée

       Comment est-elle arrivée en Méditerranée ? Deux thèses s’opposent :
          Thèse 1 : Une première souche de la Caulerpa taxifolia a été cultivée et étudiée à Stuttgart par les aquariums tropicaux du Jardin zoologique et botanique Wilhelma. Puis l'algue a été transmise, en 1980, à l'aquarium de Nancy pour finir à Monaco. Un an plus tard, le professeur du laboratoire d’environnement marin littoral de Nice donne son signalement en mer. La cause de cet accident serait son rejet, lors d’une vidange, par l'aquarium de Monaco en 1989 où elle était utilisée comme un élément décoratif.
          Thèse 2 : François Doumenge (directeur du musée océanographique de Monaco) et Jean Jaubert ont une autre vision : la Caulerpa taxifolia serait le fruit d'une mutation d'une autre espèce : la Caulerpa Mexicana qui aurait donc migré de la Mer Rouge en Méditerranée via le canal de Suez. Ainsi, l’algue présente dans nos eaux et profitant des hivers plus doux aurait muté pour donner naissance à la taxifolia que nous connaissons.

       L'Université de Genève ont montré en 1998 dans leurs travaux, par des procédés moléculaires d'analyse d'ADN, de grandes différences entre la Caulerpa taxifolia (qui diffère des populations tropicales par sa taille, sa croissance rapide et sa résistance au froid) et la Mexicana. Ce qui rend très improbable la métamorphose de l'une vers l'autre entre le canal de Suez et nos côtes françaises.
       Donc les souches actuellement présentes en Méditerranée descendent des souches tropicales, cultivées par la suite dans des aquariums publics européens où elle s’est acclimatée depuis les années 70. La Caulerpa taxifolia est bien une algue aquariophile.
       Pour conforter ces résultats, une étude hollandaise a dans le même temps prouvé qu'effectivement les Caulerpa taxifolia et mexicana n'ont pas la même carte d'identité génétique, réfutant ainsi définitivement la théorie de la métamorphose.

Morphologie de la Caulerpa taxifolia

       C'est une algue verte, haute de 2 à 15 cm de haut dans les mers tropicales mais qui peut atteindre 60 cm en Méditerranée.

Classification de l’algue

Description

       Les algues vertes du genre Caulerpa présentent la particularité d'être coenocytiques[*], c'est à dire qu'elles ne sont plus composées de cellules différenciées, mais d'une "cellule" unique géante renfermant le cytoplasme et des millions de noyaux. On peut distinguer sur ces algues les stolons[*] (="rhizomes") horizontaux, portant les frondes[*] (="feuilles") et les piliers terminés par des rhizoïdes[*], qui jouent le rôle de "racines" .

morphologie de la Caulerpa taxifolia

       La souche aquariologique méditerranéenne de Caulerpa taxifolia présente des caractéristiques morphologiques et physiologiques inhabituelles par rapport à la plupart des souches tropicales : longueur des frondes supérieure (jusqu'à 80 cm au lieu de 25 cm dans les eaux tropicales), densité exceptionnelle des frondes (14000 frondes. m-2), adaptation à un large spectre de températures, synthèse de substances toxiques, et une résistance aux températures froides (survie à 10°C pendant 3 mois pour le spécimen méditerranéen contre seulement 20°C pour les spécimens tropicaux).

Caractéristiques de la Caulerpa taxifolia

       La Caulerpa taxifolia est une algue autotrophe. La photosynthèse fonctionne grâce aux plastes verts dans les frondes et les produits élaborés circulent dans les stolons pour alimenter des parties très éloignées.
       À côté de ce mécanisme, la Caulerpa taxifolia est capable de dissoudre l'apatite (forme minéralisée du phosphate de calcium) accumulée dans les sédiments, et d'absorber ainsi le phosphore par ses rhizoïdes. Les Caulerpes, comme de nombreux végétaux, synthétisent des substances toxiques qui les protègent des prédateurs (herbivores) et parfois des compétiteurs (autres espèces d'algues qui s'installent sur les mêmes types de fond).

       De plus, la Caulerpe peut aussi absorber des acides aminés (matière organique), ce qui serait la preuve d'une aptitude à l'hétérotrophie. Enfin, une équipe de l'Institut Pasteur a montré la présence de bactéries (Rhodopseudomonas) dans les rhizoïdes. Ces bactéries possèdent le gène nif (nitrogen fixation) permettant la fixation de l'azote pour le transformer en azote minéral.

La reproduction

Par bouturage[*]

       Chez la Caulerpa taxifolia, c’est la totalité du thalle[*] qui se détache pour aller se développer et former un nouvel individu. Il semblerait que la dissémination de Caulerpa taxifolia sur de courtes distances se fait principalement par le transport de boutures emportées par les courants. Un petit fragment de l'algue suffit pour donner naissance à une nouvelle colonie.

       Ainsi, comme le suggère l’histoire de la propagation de cette algue, le transport des boutures de Caulerpa taxifolia s’effectue sur de longues distances essentiellement par le biais d’activités humaines via les ancres de bateaux et les filets de pêche. Les fragments de l’algue peuvent survivre jusqu’à 10 jours dans un endroit humide, à l’abri du soleil, accrochés au système d’ancrage, aux engins de pêche, voire au matériel de plongée. Puis, une fois rejetés à la mer, ils peuvent se régénérer. Un petit fragment de l'algue suffit pour donner naissance à une nouvelle colonie.

La croissance de la Caulerpa taxifolia

Evolution saisonnière de l’algue en Méditerranée

       La croissance de ses stolons commence en mai-juin et les meilleures conditions de croissance sont observées en août-septembre (jusqu'à 1,5 cm par jour). Les stolons de la Caulerpa taxifolia peuvent ainsi s'étendre sur près de 2 m en une année et tisser un réseau très dense : on a mesuré jusqu'à 350 m de linéaires de stolons par m² de fond.

       Le professeur Thibaut, en 2001, a proposé la division du cycle annuel des variations de biomasse de la Caulerpa taxifolia en 4 phases : la quiescence (janvier à mars), la croissance (avril à juillet), l’équilibre (août à octobre) et la dégénérescence (novembre à décembre).

       Au printemps, la prairie est formée de petites frondes courtes (2 - 4 cm) et très denses (11 000 frondes/m²). Leur partie supérieure est nécrosée mais très ramifiée. Fin avril, lorsque la température dépasse 15°C, la croissance des stolons redémarre. Celle des frondes primaires et des ramifications débute plus tard lorsque la température atteint 17 - 18°C. En été, la densité des frondes reste élevée (13 000 frondes primaires/m²). Les frondes primaires sont longues, peu nécrosées et non ramifiées. En automne, les frondes atteignent une longueur moyenne comprise entre 10 et 15 cm. Il apparaît alors une nouvelle génération de frondes qui perdure pendant l’hiver. Avec la diminution de la température, la croissance de l’algue s’arrête. L’extrémité des longues frondes de l’année précédente se nécrose alors que résistent les nouvelles petites frondes (2 - 4 cm) apparues en automne. Jusqu’au printemps suivant, les frondes restent courtes, nécrosées et très ramifiées.

croissance de la Caulerpa taxifolia en fonction de la température

       Cette souche peut survivre à des températures comprises entre +10°C et +31°C. Il est donc peu probable qu'elle disparaisse naturellement des sites où elle s'est nouvellement implantée. En effet on a constaté qu’entre 4 et 5° C les parties supérieures (frondes, stolons) de l’algue mouraient mais que les parties enterrées (rhizoïdes) dans le sédiment, permettent la régénérescence de celle-ci.

croissance de la Caulerpa taxifolia en fonction de la température

       La Caulerpa taxifolia tolère les températures hivernales relativement basses du Nord de la Méditerranée. En effet on a constaté qu’entre 4 et 5° C les parties supérieures (frondes, stolons) de l’algue mouraient mais que les parties enterrées (rhizoïdes) dans le sédiment, permet la régénérescence de celle-ci. Au printemps, avec le réchauffement des eaux, la croissance de l'algue devient rapide (jusqu'à 13 cm.) permettant la colonisation de la plupart des substrats[*], de 0 à 30 m de profondeur (jusqu'à -60 m dans le bassin oriental).

croissance de la Caulerpa taxifolia en fonction de la température

Facteurs de croissance de l’algue

       Lorsqu'une partie de la Caulerpa taxifolia est sectionnée la cicatrisation est rapide, la partie séparée (bouture) peut alors se développer indépendamment.

       La dissémination de la Caulerpa taxifolia sur de courtes distances se fait principalement par le transport de boutures emportées par les courants. Un petit fragment de l'algue suffit pour donner naissance à une nouvelle colonie, la progression de cette nouvelle colonie peut alors être très rapide.

       Grâce à ses rhizoïdes équivalents à un système d’ancrage, la Caulerpa taxifolia est capable de s’installer sur tous les types de substrat, depuis la vase jusqu’à la roche. De vastes prairies sont trouvées entre 5 et 35 mètres. On l'a même retrouvé à 90 mètres. L’algue est capable de s’adapter aux faibles intensités lumineuses en développant une longueur de fronde supérieure.

       Fin 2000, 131 km² de fonds marins sur 191 km de linéaire côtier (103 stations) étaient colonisés par l’algue en Méditerranée. Les pays actuellement touchés sont l’Espagne, la France, Monaco, l’Italie, la Croatie, la Tunisie, les USA et l’Australie. En France, fin 2002, les surfaces concernées se chiffraient à 4924 ha répartis sur 105,3 km de Littoral.

       Autre élément contributeur; la Caulerpa taxifolia synthétise des substances toxiques qui les protègent des prédateurs. De plus, les ancres des bateaux transportent l’algue qui pourra s’implanter dans un nouvel environnement grâce à une morphologie propice.

       Tous ces facteurs favorise l’expansion de la Caulerpa taxifolia.

L’expansion de la Caulerpa taxifolia

       Grâce à une croissance galopante et à une morphologie propice, on peut parler d’une véritable expansion de la Caulerpa taxifolia :

Cinétique

cinétique de l’expansion d’une colonie

       Une colonie de Caulerpa taxifolia de 20 mètres la 1ère année peut atteindre plusieurs kilomètres la 5ème année. Par son aspect envahissant, la Caulerpa taxifolia est en compétition particulièrement avec les herbiers de posidonie, principal écosystème présent en Méditerranée.
       D’abord présente aux alentours de Monaco, elle a été repérée très vite à des distances considérables de son point d’introduction.

       En 1990, la Caulerpa taxifolia est trouvée dans les Alpes-Maritimes, puis dans le Var (Toulon). A ce stade, son expansion s’accéléra. En 1991, elle est signalée dans plusieurs nouveaux sites des Alpes-Maritimes, du Var et même des Pyrénées-Orientales. En 1992, alors que de nouvelles stations sont découvertes en France, elle est observée pour la première fois en Italie (Ligure et Toscane) et aux Baléares (Majorque). En 1993, l’algue est vue en Sicile, à l’île d’Elbe et de nouveaux herbiers sont repérés en Ligure italienne et sur la Côte d’Azur française. En janvier 1994, la Caulerpa taxifolia est détectée en Mer Adriatique (Croatie). En mars 2000, la Caulerpa taxifolia atteint les côtes méridionales de la Méditerranée : elle est signalée devant Sousse en Tunisie. L’algue invasive continue de s’étendre dépassant les 13000 ha en 2001. La même année, elle est aussi découverte en Californie, au Japon et en Australie. Aujourd’hui, elle couvre plus de 20000 ha en Méditerranée dont 10000 ha pour les côtes françaises.

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 Partie de Farah YOUSFI: Présentation de l'algue 

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 TPE réalisé par Farah YOUSFI, Nicolas VINCENT et Sylvain PICHOT, 1èreS au lycée agricole de Valabre ! en 2007/2008
 © Auteur du site: Sylvain Pichot 


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